Mon premier DNF… ou presque

En fin de semaine dernière s’est déroulé le XC de la Vallée, un événement vraiment bien organisé par l’équipe d’Horizon 5 dans la Vallée Bras-du-Nord, à St-Raymond de Portneuf. Je ne sais pas à quoi j’ai pensé cet été, mais je me suis inscrit à l’épreuve du Trans-Vallée, soit 10km de nuit le vendredi soir, 38km le samedi et 21km le dimanche. Le problème (ou le plaisir, c’est selon), c’est que le parcours est «très» difficile : il est parsemé de roches, de racines, de bouette, de montées, de descentes, bref, de tout ce qui vous ralentit. L’autre problème, c’est que 99% de mon entraînement cette année s’est fait sur route et sur des distances relativement courtes. Si on veut résumer ma situation le vendredi soir, on aurait simplement pu dire que «je n’étais pas prêt».

Par contre, je savais que ce serait une belle occasion de passer une bonne fin de semaine entre amis, de faire du camping, de relaxer (mentalement) et de répondre à plusieurs questions :

  • Est-ce que connaître le parcours équivaut à y être bien préparé? (2013 vs 2011)
  • Est-ce que «less is more» en terme d’entraînement?
  • Est-ce que je suis moi-même capable de faire ce que je propose aux autres de faire, c’est à dire de sortir de ma zone de confort, de surmonter une épreuve à laquelle je ne suis pas parfaitement préparée?
  • Est-ce que je suis capable de mettre mon ego de côté et de participer sans être compétitif?

Les réponses après la pause 😉

Vendredi – 10km de nuit

Pour moi, le 10km de nuit, c’est un prologue. C’est trop court (dans l’ensemble de l’épreuve) pour que ce soit intéressant de tenter de maximiser ma performance. En plus, je m’arrange toujours pour avoir une lampe frontale qui a des piles un peu faibles pour être certain de ne pas voir grand chose. J’ai donc pris un rythme confortable aux côtés de Blaise Dubois, Jean Fortier et d’un petit groupe de coureurs. J’ai tenté de garder ces coureurs derrièr moi, car leur lampe frontale m’éclairait mieux que la mienne. À la fin de la course, le gagnant de l’épreuve, Jeff Gosselin revient vers nous et me crinque pour un petit «kick». Bilan : 58:14

Samedi – 35km

En me levant, je ne ressentais aucune courbature, c’était déjà bon signe! Je me suis levé et j’ai essayé de manger le plus possible pour pouvoir passer au travers des 35 km. J’avais l’expérience de l’avoir déjà fait et je savais que je ferais un temps entre 5h20 et 6h, alors je me suis préparé mentalement à courir longtemps. On a pris l’autobus, puis on est arrivé au site de départ. J’étais assez fébrile, mais j’avais la ferme intention de ne pas faire comme la dernière fois et adopter un rythme conservateur.

Je suis donc parti avec Blaise, à un rythme qui me semblait facile. Je n’étais pas essoufflé et je pouvais facilement parler pendant notre course. Sauf que j’avais complètement oublié ce que nécessite ce type de course.

Puisqu’on ne court pas sur l’asphalte, mais bien dans la boue, dans les roches, dans des montées et des descentes abruptes, ce n’est pas tant le système cardio-vasculaire qui est sollicité, mais plutôt les muscles. Sans m’en rendre compte, pendant les 10 premiers kilomètres, j’ai hypothéqué mes muscles pour le reste de la fin de semaine. Le manque d’entraînement en sentier a fait que je n’étais pas très efficace et je devais souvent compenser en faisant des mouvements explosifs. Après environ 10km, je sentais mes muscles qui commençaient à être fatigués. Vers le 13e kilomètre, j’ai laissé aller le petit groupe avec qui j’étais pour me donner une chance de terminer. Ce fût la descente aux enfers. Pendant les 3 kilomètres suivants, je me suis fait passer par une quinzaine de personnes, ce qui est assez démoralisant. Dans ma tête, c’était impossible de terminer cette épreuve. Je me sentais au bord des crampes, sans énergie. J’avais l’impression d’être le dernier de la course.

Je préparais dans ma tête un article pour expliquer ce DNF sur Course à pied.ca. Je me demandais ce que mon père dirait lorsque je lui annoncerais mon DNF. Je pensais à toutes les personnes que j’ai encouragé à dépasser leurs limites alors que je n’étais pas capable de le faire moi-même. La bonne nouvelle, c’est que dans une trail, tu peux pas abandonner où tu veux, il faut que tu te rendes au point de ravitaillement suivant pour abandonner.

 

35km
En voyant du monde au point de ravitaillement, un sourire m’est revenu. Il y a encore des humains! Contrairement au premier ravitaillement, j’ai pris mon temps pour manger un peu de nourriture solide. J’ai aussi rencontré Benoît Talbot, un vrai trail runner qui m’a encouragé et avec qui j’ai fait les quelques kilomètres suivants. La combinaison de nourriture, de personnes et de parcours un peu plus facile m’a donné l’espoir de finir et ça m’a enlevé une pression énorme.

Pour faire une histoire courte, j’ai fini par finir, dans la souffrance, sans me perdre. J’ai même rattrapé 2-3 gars dans les derniers kilomètres. Voici la chanson qui était dans mon jukebox psychologique pendant les 2 dernières heures :

Je me disais que ma situation n’étais pas si pire finalement. J’avais seulement (très) mal aux jambes. Pas de cancer, en pleine santé, des amis et de la nourriture qui m’attendent (depuis trop longtemps). Tout ce que j’avais à faire c’était de m’y rendre. et je m’y suis rendu! Bilan : 5h47

Dimanche – 21km

Disons qu’en me réveillant, je n’étais pas exactement frais comme une rose. Je marchais assez carré et j’avais encore envie de dormir un petit peu. J’étais déjà assez fier de ne pas avoir abandonné le samedi, alors je savais que je pouvais terminer le 21,1km du dimanche sans trop de problème. En plus, j’étais encouragé parce qu’à mon souvenir, le 21km du dimanche était VRAIMENT plus facile que le 35 km du samedi et beaucoup plus rapide.

Mon souvenir était assez loin de la réalité.

C’est vrai que les 3 premiers kilomètres sont presque gratuits. Le sentier est large, facile et plat. Par contre, après ce sentier s’ensuit une montée de plus ou moins 5km. Le problème avec la montée, c’est que les descentes de la veille avaient fortement endommagé et fatigué mes quadriceps. Monter sans quadriceps, c’est assez difficile, alors je me suis retrouvé à marcher presque toutes les montées du 21,1km. La journée fût donc assez longue, surtout les cinq derniers kilomètres qui ne semblaient jamais finir. Par contre, ce n’était rien de comparable à la souffrance que j’ai éprouvée le samedi. Le dernier kilomètre du parcours était une route en terre battue. Lorsque je suis arrivé dessus, comme par magie, j’ai réussi à courir et même à bien courir. J’étais vraiment surpris et j’ai alors réalisé que ce qui m’avait beaucoup nuit pendant cette fin de semaine, c’était mon manque de préparation spécifique.Arrivée_21

 

Ce que j’en retiens :

Est-ce que connaître le parcours équivaut à y être bien préparé? (2013 vs 2011)

En tout cas, les résultats sont meilleurs et la souffrance est moins grande lorsque je suis mieux préparé, même si je ne connais pas le parcours!

Est-ce que «less is more» en terme d’entraînement?

Je sais qu’il y a plusieurs personnes en ce moment qui préconisent des intervalles très courts et peu de volume pour vous préparer à n’importe quelle distance. Je pense que ces personnes n’ont jamais participé à de vraies épreuves de longue distance. Je n’ai pas de science, mais je peux vous garantir que j’aurais pris volontiers quelques sorties spécifiques en trail de longue durée avant cette épreuve au lieu de n’importe quelle séance de cross-fit, de sprint Tabata ou d’intervalles à très haute intensité. Cela ne prouve pas que l’entraînement court est mauvais, mais je sens que j’ai besoin d’un certain volume de travail spécifique pour bien performer.

Est-ce que je suis moi-même capable de faire ce que je propose aux autres de faire, c’est à dire de sortir de ma zone de confort, de surmonter une épreuve à laquelle je ne suis pas parfaitement préparée?

On dirait que oui.

Est-ce que je suis capable de mettre mon ego de côté et de participer être compétitif?

J’ai pas eu le choix!

Merci à Jean Fortier et Horizon 5 pour l’organisation impeccable!

Merci à mes amis Mathieu et Laurie, ainsi qu’à ma copine Sophie qui m’ont aidé à récupérer toute la fin de semaine!

Merci spécial à Benoît Talbot qui m’a aidé à remonter la pente au niveau psychologique!

 

 

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Daniel Riou Directeur général
Directeur général du Groupe Défis, fondateur du Défi Entreprises et co-fondateur d'Altterre. J'adore tout ce qui touche l'activité physique et la santé globale. Détenteur d'un baccalauréat en Kinésiologie de l'Université Laval Diverses formations par La Clinique du Coureur Programme Émergence de l'École d'Entrepreneurship de Beauce Programme National de certification des entraîneurs Niveau 2 en badminton Programme National de certification des entraîneurs Niveau 1 en haltérophilie

8 réflexions au sujet de “Mon premier DNF… ou presque”

  1. Salut Dan,
    Beau témoignage! Tu me rappelles des souvenirs que j’aurais aimé oublier!!! 😛
    Aussi, une analogie en rapport à tes 2 premières questions: Blaise a performé comme un jeune fringuant alors qu’il n’avait pas eu l’occasion de faire du gros volume. MAIS, tous ses entraînements ont été faits dans les trails autour de chez lui.
    Comme quoi le spécifique paie…

    C’était un superbe week-end et je ne sais pas si t’es comme moi mais j’ai déjà hâte à ma revanche face à ce foutu 38km!!!
    Bonne semaine!

    Lee

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    • Blaise n’a peut-être pas fait de gros volume, mais il m’a dit avoir fait 2-3 sorties de 30km en trail… Je trouve que c’est des sorties d’assez grand volume, même si le total hebdomadaire n’est pas très grand. Tu as raison, peut-être que l’objectif n’est pas d’avoir un gros volume d’entraînement, mais plutôt un assez grand volume de préparation spécifique. En ce sens, Blaise avait un grand volume de préparation spécifique (longue sortie en trail….). Je prend ça en notre pour l’an prochain! Ça et aussi commencer à manger avant 1h45 de course…

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  2. La qualité que j’apprécie le plus chez un sportif c’est l’humilité.
    Merci de nous raconter cette histoire.
    Pour ma part, tu gagnes encore plus en crédibilité.
    Félicitation pour avoir terminer ta course.

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  3. Je seconde Martin Charland!

    Ce qui est bien, c’est de voir quelqu’un d’un niveau avancé , venir me démontrer qu’il vit le même genre de situation que je vis , simplement que le seuil de confort n’est pas au même endroit.

    J’ai vécu ce même genre d’expérience au 5k du Qmtrail cet été et au 10k de nuit l’année dernière(Fini les deux sur les rotules). Cette année j’ai vaincu le 10k de nuit en le terminant sans être incommodé. J’avais même encore de l’énergie.

    En sortant de notre zone de confort, on s’expose à ce genre de chose , peut-être même à l’échec complet ,mais quelle satisfaction de lorsque le défi ne tombe plus hors de nos capacités, jouissif! J’ai beau avoir terminé le dernier de ma catégorie au 10 de nuit cette année , j’ai fini sans avoir l’impression d’être vaincu et avec un chrono amélioré de 17 mn. La compétition était beaucoup plus féroce car l’année dernière je n’étais pas dernier malgré ma contre performance.

    J’ai déjà hâte à l’an prochain :). Ma zone de confort s’agrandit!

    Je crois donc que la connaissance du parcours aide à la préparation et à se faire une stratégie de course(Mollo dans la grande côte et à fond sur le plat). Mais pas toujours car ça m’a pas aider au QMTrail.

    La préparation spécifique aide, car j’ai fait beaucoup de trail en préparation pour le XC, maintenant que j’habite à 2 pas de la forêt, alors que pour le Qmtrail je n’avais presque juste de la route.

    Aussi, j’ai découvert que je ne peux pas m’en tenir à l’eau si j’utilise beaucoup mes quadriceps comme dans les trails , sinon je manque d’énergie…Mais ça c’est un aspect que je veux rechercher cet hiver, comprendre le mécanisme et pourquoi je semble en avoir besoin plus tôt que recommandé et comment m’améliorer …enfin, bref je m’égare.

    Depuis 2 ans que je coure les courses organisées et je suis presque toujours hors ma zone de confort, mais j’aime ça comme ça! Tout ça parce que quelqu’un m’a fait découvrir le Défi entreprise et j’ai attrapé la fièvre des courses organisées!

    Maintenant, je compte bien participer au Trans-Vallée d’ici quelques années, ça va devenir mon seuil de confort un jour 😉

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  4. Je suis tout à fait d’accord avec les commentaires de Martin Charland.

    Pour ma part, ma pire course à vie fût la course où j’étais la plus confiante sur la ligne de départ et ça m’en a mis toute une claque à l’orgueil. Mais c’est aussi de cette course que j’ai le plus apprise, et qui m’a rendu encore plus forte non seulement comme coureuse, mais comme personne. J’ai appris à ne rien prendre pour acquis et que ça prend parfois des moins bonnes courses pour être encore meilleur.

    Bravo de ne pas avoir abandonné, tu peux être fier!

    Keep going et à l’année prochaine 🙂

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  5. Salut Daniel,

    Tu nous offres un beau témoignage. C’était une belle fin de semaine et l’organisation nous a gâté encore une fois.

    Il nous arrive tous de se retrouver à plat, préparé ou pas. Ces moments sont la plupart du temps très difficiles. C’est définitivement un combat que tu as bien géré parce que tu t’es remis sur les trails le dimanche! 🙂

    Même si on court presque tous pour le plaisir, l’égo se nourri quand même de nos bonnes performances. C’est éprouvant être sur les genoux, mais c’est à la fois très bon remettre l’égo à sa place. Le mieux serait de ne pas la laisser trop se laisser gonfler par le chrono, mais bon, on est comme ça!

    J’ai été ravis de te croiser ce jour-là et très content de te voir finir!! Notre rencontre m’a fait autant de bien à moi qu’à toi et j’espère te recroiser sur une trail un jour!

    Benoit

    Répondre

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