Courir beaucoup augmente t-il le risque de mortalité ??!?

La semaine dernière, on m’a parlé d’une étude qui démontrait (!!) que les personnes qui courent beaucoup risquaient plus de décéder que ceux qui couraient « un peu ».

Cela a piqué ma curiosité : Si cela est réellement mauvais pour la santé de courir beaucoup, je vais retourner m’asseoir sur mon divan immédiatement ! Mais je ne suis pas convaincu que ce soit moins dangereux…

Pour une description complète de l’étude, je vous invite à lire le blogue d’Alex Hutchinson : Sweat Science (en anglais).

Si vous désirez un résumé en français, continuez votre lecture ci-bas.

 

Voici sommairement  les chiffres sur lesquels se basent les auteurs pour arriver à la conclusion suivante  :

« Light and moderate joggers have lower mortality than sedentary nonjoggers, whereas strenuous joggers have a mortality rate not statistically different from that of the sedentary group. »

Traduction libre : ceux qui courent un peu ou qui courent modérément ont un taux de mortalité plus bas que les sédentaires, mais ceux qui courent beaucoup ont un taux de mortalité non significativement différent des sédentaires.

Sujets Décès   Taux de mortalité
Sédentaires 413 128 0.30992736
Cours un peu 576 7 0.01215278
Quantité modérée de course 262 8 0.03053435
Beaucoup de course 40 2 0.05

 

Je ne suis pas spécialiste des analyses bio-statistiques, mais je peux affirmer que c’est quasi normal qu’il n’y ait pas de différence statistiquement significative entre le groupe sédentaire et le groupe qui court beaucoup : il n’y a tout simplement pas assez de sujets pour que la différence soit statistiquement significative.

Quand même, les coureurs qui courant beaucoup ont eu un taux de mortalité de 5 % sur 10 ans, alors que le taux des sédentaires était de 30 %. Ce n’est pas une preuve que courir beaucoup est mieux que « pas courir du tout », car la différence n’est pas statistiquement significative (= retour à la case départ).

 

En plus, dans l’étude, je constate d’autres problèmes :

  • Le groupe sédentaire a une moyenne d’âge plus élevée,
  • Le groupe sédentaire est composé d’environ 50% d’hommes, alors que le groupe de ceux qui courent beaucoup est composé de 80% d’hommes,
  • On ne connaît pas la cause des deux morts dans le groupe de ceux qui courent beaucoup…

Encore une fois, si vous voulez davantage de détails ou une analyse plus complète, je vous invite à consulter le blogue Sweat Science.

Cela dit, je ne serais pas surpris que ceux qui courent beaucoup (voir énormément) aient un taux de mortalité plus élevé que ceux qui courent modérément. Par contre, ce n’est certainement pas cette étude qui va nous le démontrer.

En guise de conclusion, voici le commentaire d’un article de Larry Husten sur Forbes.com, son paragraphe final, suivi de ma traduction libre :

“Journalists and scientists have an obligation to fairly and accurately report the results of individual studies, and they have the further obligation to place those results in the context of what is already known in the field. By reporting the results of this one quite limited study with little or no critical perspective of its details or the larger context of the research, they have once again helped perpetuate the scientific illiteracy and innumeracy that is fast becoming one of the hallmarks of our time.”

Les journalistes et les scientifiques ont une obligation de rapporter précisément et équitablement les études individuelles et ont l’obligation de placer les résultats dans le contexte de ce qui est déjà connu dans la littérature scientifique. En rapportant les résultats de cette étude passablement limitée, avec peu ou aucune perspective critique des détails ou du contexte de la recherche, les journalistes et les scientifiques ont une fois de plus contribué à perpétuer « l’analphabétisme scientifique », qui devient rapidement une marque de commerce de notre époque. »

 

author avatar
Daniel Riou Directeur général
Directeur général du Groupe Défis, fondateur du Défi Entreprises et co-fondateur d'Altterre. J'adore tout ce qui touche l'activité physique et la santé globale. Détenteur d'un baccalauréat en Kinésiologie de l'Université Laval Diverses formations par La Clinique du Coureur Programme Émergence de l'École d'Entrepreneurship de Beauce Programme National de certification des entraîneurs Niveau 2 en badminton Programme National de certification des entraîneurs Niveau 1 en haltérophilie

5 réflexions au sujet de “Courir beaucoup augmente t-il le risque de mortalité ??!?”

  1. Bon post Daniel. Il est aberrant de voir de telles conclusions basées sur un échantillon si petit de personnes. Les recherches à ce sujet se doivent d’être beaucoup plus rigoureuses et à grande échelle. L’enjeu est important, à une époque où tant d’ambassadeurs comme toi réussissent à amener la population à aimer l’activité physique. Peut-être que la cause du décès de ces 2 coureurs est un accident de voiture?

    Répondre
  2. C’est n’importe quoi ce papier. Pourquoi mettre l’emphase sur la non différence entre les ‘gros coureurs’ et les sédentaires alors que tout ce que ça prouve c’est qu’il y a aucune différence à nul part. Je vois difficilement comment 30% et 5% peuvent ne pas être différent mais que 3% et 5% le soit. C’est pas comme si c’était si compliqué de trouver des coureurs qui courent beaucoup…

    Répondre
  3. Étant moi même dans le domaine des sciences, ton analyse est très bonne. En effet, l’échantillonnage est trop faible dans le groupe « coureur » pour conclure quoi que ce soit. En fait, nous pourrions même croire qu’avec un groupe plus important (et, balancé!), le taux serait similaire à celui des coureurs à temps partiel mais différent du groupe sédentaire. C’est malheureusement de plus en plus fréquent que pour « vendre » une nouvelle, même scientifique, certains jouent avec les mots pour créer un effet choc…

    Répondre

Répondre à Jean-Francois Esculier Annuler la réponse

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.