Devriez-vous débuter le chi running?

Au courant des vingt dernières années, la course à pied a pris son essor. Des millions de personnes ont débuté cette activité et, évidemment, cela a entraîné des blessures de toutes sortes pour plusieurs personnes. Pour remédier à la situation, toutes sortes de solutions ont été inventées : des chaussures plus coussinées, des chaussures minimalistes, ainsi que différentes techniques de course. Une de ces technique se nomme Chi Running. Devriez-vous débuter le Chi Running?

Bonne question. Pour en savoir plus sur cette fameuse technique, j’ai lu le livre Chi Running de Danny Dreyer.

Tout d’abord, qui est Danny Dreyer? Il s’agit d’un coureur d’ultra-marathon, un instructeur de tai-chi et le fondateur de l’entreprise  »Chi Running ». Il vend notamment des livres et donne des cours dans lesquels il enseigne sa technique de course.

Voici quelques pistes de réflexion sur ce livre :

Est-ce que le Chi Running est vraiment la meilleure façon de courir?

Selon le livre, la technique de course  »Chi Running » serait la meilleure façon de courir. Ceux qui ne courent pas de cette façon devraient changer leur façon de courir.

À mon sens, si une personne court déjà et qu’elle n’est pas blessée, lui suggérer de changer sa technique de course n’offre pas de bénéfices majeurs, alors que les risques de blessures engendrés par un changement de technique de course sont élevés.

En gros, la balance risque-bénéfices potentiels penche fortement en faveur du statu quo pour quelqu’un qui n’est pas blessé.

If it’s not broken, don’t fix it, dis le proverbe.

Peu de références scientifiques qui supportent le Chi Running

Deuxièmement, M. Dreyer n’apporte aucune étude, aucun autre argument que des arguments de tai-chi et sa propre expérience.

Je n’aurais pas de problème avec cela, s’il présentait ses conseils comme étant des conseils nés de son expérience. Par contre, s’il présente sa technique de course comme étant la meilleure et celle que devraient adopter les coureurs, il se doit de soutenir ses arguments par des recherches.

Arguments et passages farfelus

Troisièmement, certains arguments et certaines propositions me semblent farfelus et surtout, sans fondements scientifiques. Voici quelques passages qui m’ont fait sursauter :

1. The Discovery of Chi Running. Traduction libre : La découverte du Chi Running

Il parle à maintes reprises de la  »Découverte » du Chi Running, alors qu’en fait, il suggère plutôt des comportements de modérations d’impacts qui sont utilisés naturellement chez les enfants et les personnes qui courent pieds-nus. Il n’y a aucune découverte majeures dans cette technique de course.

2. En parlant des enfants: « They’re enjoying the game of tag and having so much fun that there is very little actual work going on when they are running. And since very little effort  is involved in their movement, there is little chance for injury.  Traduction libre : Les enfants apprécient le jeu de  »tag » et ont tellement de plaisir qu’ils font en fait vraiment peu d’efforts (travail). Et puisqu’ils font peu d’efforts dans leurs mouvements, il y a peu de risques de blessures.

Je ne sais pas pour vous, mais quand je regarde mes enfants jouer à la tag, je note qu’ils ont chauds, ce qui implique qu’ils travaillent fort. Et au niveau des risques de blessures, je me dois d’être en désacord aussi, j’ai vu de nombreuses blessures (bénignes, j’en conviens) être la conséquence du jeu de la tag.

3. The most common theory says that the primary cause of running injuries is overtraining. I also belive this to be a myth. I believe the primary cause of injury is poor running form and poor biomechanics. Traduction libre : la théorie la plus commune stipule que la première cause des blessures de course est le surentraînement. Je crois que c’est un mythe. Je crois que la première cause des blessures est la mauvaise technique de course et une mauvaise biomécanique.

Encore une fois, une belle grande affirmation qui est soutenue par… rien du tout.

Le corps humain peut s’adapter à beaucoup de choses si on lui donne le temps de s’y adapter. D’ailleurs, on note que les gens qui débutent la course à pied en faisant moins de course se blessent moins que ceux qui débutent en faisant plus de course.

Un exemple de personne qui ne se blesse pas beaucoup et qui a une technique de course unique :

4. If there is an imperfection in your biomechanics, it will eventually show up as an ache or pain. Traduction libre : s’il y a une imperfection dans votre technique de course, elle va se manifester par une douleur.

Rien de moins certain, surtout si on y est habitué… D’ailleurs, je donnerais le défi suivant à M. Dreyer :

  1. Regarder la technique de course de 100 individus
  2. Noter leurs défauts biomécaniques
  3. Prédire quelle sera leur prochaine blessure

Pas mal certain que la valeur prédictive de ses analyses sera assez faible.

5. (En parlant des coureurs Kenyans) Their legs are slender because they have such excellent running economy. They’re so efficient they don’t need big leg muscles. Traduction libre : Leurs jambes sont effilées parce que leur économie de course est élevée. Ils sont tellement efficients qu’ils n’ont pas besoin de gros muscles dans leurs jambes.

Si on continue dans cette logique, est-ce que les joueurs de basket grandissent parce qu’ils essaient d’aller toucher le panier?

Ou alors, est-ce que les muscles de Sydney Crosby devraient rapetisser vu qu’il a une belle technique de lancer du poignet?

En gros, la morphologie est surtout génétique et la course à pied n’engendre pas d’hypertrophie des muscles. La technique de course a probablement très peu d’influence sur la taille des muscles.

6. With the ChiRunning technique, you won’t be pushing off with your toes. Traduction : Avec la technique du Chi Running, vous ne pousserez pas avec vos orteils.

Les muscles du pieds travaillent en synergie. Pour que vous puissiez vous propulser, vous aller devoir contracter pas mal tous les muscles qui passent sous votre pied, incluant les muscles qui provoquent la flexion des orteils. Ce n’est pas une énorme erreur, j’en conviens, mais quand on prétend enseigner une technique et qu’on écrit un livre à ce sujet, il faut être rigoureux.

7. all you have to do is (lean and) pick up your feet Traduction : Tout ce que vous avez à faire est de vous pencher vers l’avant et de soulever vos pieds.

Essayez juste pour voir. Qu’arrivera-t-il?

8. Il dit qu’il faut toujours garder la même cadence… Et la même longueur de foulée.

Si on fait cela, comment peut-on aller plus ou moins vite?

Encore une fois, ce n’est pas une énorme erreur, mais ça manque de rigueur à mon goût.

9. Il insiste pour que notre pied tombe directement sous le poids du corps. La vérité, c’est que c’est pratiquement impossible. Même chez les meilleurs coureurs au monde (auxquels il fait référence d’ailleurs), le pied tombera légèrement devant le centre de masse. Voici d’ailleurs une vidéo ralenti qui vous en donnera le coeur net.

Ma conclusion sur le Chi Running

En gros, à part pour satisfaire votre curiosité, je ne suggère pas la lecture de ce livre, même si je suis persuadé que M. Dreyer est bien intentionné. En fait, si vous désirez vraiment améliorer votre technique de course, voici mes suggestions :

Et si vous avez envie de venir courir avec nous n’hésitez pas à venir nous visiter dans un de nos prochains événements!

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Daniel Riou Directeur général
Directeur général du Groupe Défis, fondateur du Défi Entreprises et co-fondateur d'Altterre. J'adore tout ce qui touche l'activité physique et la santé globale. Détenteur d'un baccalauréat en Kinésiologie de l'Université Laval Diverses formations par La Clinique du Coureur Programme Émergence de l'École d'Entrepreneurship de Beauce Programme National de certification des entraîneurs Niveau 2 en badminton Programme National de certification des entraîneurs Niveau 1 en haltérophilie

10 réflexions au sujet de “Devriez-vous débuter le chi running?”

  1. Je n’ai pas lu ce livre. Je crois qu’il est préférable que ce genre d’ouvrage soit écrit comme un témoignage (voila ce que je vis en tant que coureur), car même avec des preuves scientifiques nous nous rendons compte que les entraînements évoluent ainsi que le matériel. Dans les années 80 la révolution était de courir avec des semelles amortissantes. Les scientifiques n’en sont plus aussi certains de cela en 2011…

    Je suis préparateur mental mais pas préparateur physique. Quand un coureur me demande un plan d’entraînement je refuse car je n’en ai tout simplement pas les compétences. En revanche je peux évoquer mes entraînements basés sur le plaisir, mais en aucun cas je peux affirmer que c’est la bonne méthode, parce que ma façon de courir m’appartient.

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    • Bonjour Stéphane, merci de ta réponse que je trouve pertinente. Si le livre était écrit comme un témoignage, je n’aurais rien à redire. Par contre, il me semble que si on veut offrir un ouvrage de référence, il y a des critères de qualité à respecter. En passant, je viens de jeter un coup d’oeil à ton site, ça a l’air intéressant ce que tu fais! Au plaisir de te lire!

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      • Salut Daniel. Oui il est clair que pour un bouquin de référence il est préférable d’avoir… des références.
        Cela dit, cette discussion tombe à point nommé. Je suis en train d’écrire un livre (manuel) qui devrait être terminé en janvier et qui, je l’espère et travaille pour, sortira en 2012. Ton article me donne à réfléchir encore plus à ce que je voudrai vraiment pour ce livre.

        Merci pour mon site. Oui j’utilise la préparation mentale autant pour le sport,
        que pour l’entreprise et les particuliers. Me lancer un défi de course à pied au
        Québec et y animer des conférences me plairait drôlement ! Encore une réflexion supplémentaire !

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    • Salut Fred,
      La vitesse est directement relatif à 2 facteurs : cadence x longueur des pas.
      Si la cadence ne change que très peu durant un jogging à 6 minutes du km vs à 3 minutes du km pour les athlètes efficaces, la différence est automatiquement sur la longueur des pas (qui change de façon plus importante donc). J’ai assisté à une conférence de Jack Daniels aujourd’hui sur ce sujet… déjà en 1984 il constatait que les olympiens, hommes et femmes, de 1500m au marathon avaient des cadences presque similaires, autour de 180 pas par minute.
      Pour plus d’info http://www.therunningclinic.ca/blog/2011/06/cadence/

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      • Salut Blaise, je sais qu’il y a plusieurs études sur le « plus de 180 pas par minute » chez des athlètes de haut niveau, mais est-ce qu’il y en a avec des coureurs récréatifs? Peut-être l’as tu déjà lu, mais Steve Magness a écrit un excellent post au sujet du 180. Je pense effectivement que en haut de 170, c’est mieux, mais comme il le dit, pour quelqu’un qui court à 7 minutes au kilo, ça donne des pas de 70 cm… c’est un peu court, non? Au final, je pense que ton conseil de suivre la cadence qu’on utilise naturellement pied-nu est excelllent. Par contre, selon le post de Steve, la fréquence de foulée augmenterait en fonction de la vitesse. Même conclusions du côté de Alex Hutchinson: http://sweatscience.com/cadence-in-elite-runners-increases-as-they-accelerate/

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